Les risques auditifs

Les actions de sensibilisation et de prévention en ce qui concerne la gestion sonore et les risques auditifs, dans le milieu festif entre autres, se sont récemment développées.

État des lieux et prévention

Le baromètre d’Agison 2020, qui tente de mesurer les risques auditifs pris par les jeunes ainsi que l’impact des messages de prévention sur cette prise de risque, indique que 88% du public s’estime informé des risques auditifs en salle de concert et en festival. L’usage de protections auditives a progressé de 43% en 10 ans. Cependant, encore 13% des jeunes reconnaissent avoir des comportements risqués mais ne veulent pas changer, et 8 spectateurs sur 10 ont déjà ressenti un acouphène.

Il est donc essentiel (et également obligatoire) de permettre au public de s’informer et de se protéger lors de vos événements. Le risque existe même si l’on n’en a pas toujours conscience.

Les risques

L’oreille interne est constituée de milliers de cellules sensibles. Lorsque l’oreille est exposée à un volume sonore excessif, un bruit brutal, des sons aigus, une durée d’écoute prolongée, ces cellules peuvent être abîmées, voire détruites. Ces cellules ne sont pas réparables, leur destruction est donc définitive.

Le seuil de danger, pour l’oreille, se situe à partir de 85 décibels, ce qui est finalement très bas. Cette limite est à nuancer ; notre capital auditif se détériore au fur-et-à-mesure de notre vie, et c’est un phénomène normal. Mais trop d’expositions à des volumes sonores élevés, durant trop longtemps, peut provoquer des troubles, qui sont situés à différents niveaux :

  1. Les acouphènes : nous sommes nombreux à connaître ce phénomène, un bourdonnement ou un sifflement continu.
  2. L’hyperacousie : entendre de manière très forte le moindre bruit.
  3. La surdité partielle ou totale, qui peut apparaître prématurément et définitivement.

Il y a donc un réel risque de perdre une partie de l’audition, de manière définitive. Ces troubles peuvent arriver brutalement et à tout âge, parfois suite à un seul excès.

Le nouveau cadre légal et ses limites

Depuis 2017, un décret relatif à la prévention des risques auditifs, concerne les producteurs et exploitants d’activités impliquant la diffusion de sons amplifiés, dans un local ou en extérieur.

Le décret « son » rend obligatoire :

  • l’abaissement de la limite de puissance du son à 102 décibels (A) et 118 (C) sur 15 minutes (respectivement 94 et 104 décibels pour les activités destinées aux enfants de moins de 6 ans), limite qui ne doit être dépassée « à aucun moment et en aucun endroit accessible au public » ;
  • l’enregistrement en continu des niveaux sonores en décibels pondérés A et C auxquels le public est exposé, enregistrements qui doivent être conservés ;
  • l’affichage en continu à proximité du système de contrôle de la sonorisation les niveaux sonores en décibels pondérés A et C auxquels le public est exposé ;
  • l’information du public sur les risques auditifs, la mise à disposition gratuite de protections auditives ;
  • la création de zones de repos auditif ou, à défaut, des périodes de repos auditif selon une norme définie dans le décret.

Ni réaliste, ni optimal, ce décret tel qu’il est rédigé aura des conséquences lourdes sur le spectacle vivant et la filière musicale dans son entièreté : artistes, producteurs, diffuseurs, salles, festivals, équipes techniques… comme pour les spectateurs:

  • 1. L’expression artistique en danger

Les niveaux sonores imposés empêchent les artistes d’exprimer la richesse de leur style musical, mettant en péril la diversité des esthétiques.

  • 2. La diversité musicale attaquée

En effet, la baisse des basses fréquences nuit à l’ensemble des esthétiques musicales, notamment aux genres comme le reggae, les musiques électroniques, le dub et le hip hop qui disparaîtront peu à peu des scènes, réduisant la liberté d’accès des spectateurs à tous les genres musicaux.

  • 3. Les concerts et festivals en plein air menacés

L’obligation de produire une étude de l’impact des nuisances sonores sur l’environnement lors des spectacles en plein air est techniquement irréaliste. Par exemple, les conditions extérieures sont extrêmement variables le jour J, comme la présence de vent. De plus, les niveaux sonores exigés en milieu urbain sont impossibles à respecter, ce qui entraînera l’impossibilité de réaliser un concert en centre-ville.

  • 4. Toute la scène fragilisée

La limitation de la diversité musicale, l’impossibilité technique de mise en œuvre, additionnée au coût de mise en conformité (achat d’afficheurs, d’enregistreurs, de nouveaux systèmes de diffusion, formation du personnel…) met en danger tout le secteur, déjà vulnérable, d’autant qu’aucun soutien financier ou accompagnement n’est prévu par l’État.

  • 5. Le coût des études d’impact

Une étude d’impact coûte entre 4000 et 8000 € ce qui représente une charge très importante pour des manifestations ponctuelles et amateurs.

Pour l’instant, des négociations sont en cours entre le secteur et les ministères concernés afin de trouver une méthode pour réduire les risques tout en évitant la disparition de la majorité des manifestations culturelles de musiques actuelles.

En attendant l’aboutissement de ces négociations, nous vous conseillons de vous en tenir aux règles de fonctionnement en vigueur avant ce décret, c’est à dire entre 102 et 105 db sur toutes les fréquences et mettre en place des dispositions pour réduire les risques auprès de votre public et les nuisances au voisinage.

Sur certaines grosses manifestations et si vous vous installez sur le long terme sur un site, la réalisation d’une étude d’impact peut cependant avoir un intérêt afin de réduire les risques de conflit de voisinage et rassurer la mairie qui vous accueille.

Prévention et préconisations

  • Vous allez devoir aménager des zones de repos auditif sur votre événement. Cela peut se traduire par des espaces au calme, loin des enceintes, par exemple un chill-out (où la musique doit donc être à un volume suffisamment bas), ou/et par des pauses dans la diffusion du son.
  • Vous serez également obligé de proposer gratuitement à votre public des protections auditives. L’association Agison propose des bouchons d’oreille en mousse à usage unique (et recyclés) en quantité et à moindre coût. C’est ce qui est le plus généralement proposé. Il existe aussi des bouchons réutilisables, et des casques pour les enfants. Vous pouvez disposer ce matériel sur une table d’information, au niveau du chill-out si vous en avez un, à l’entrée de la manifestation, près de la scène et des enceintes…
  • Vous pouvez mener des actions de sensibilisation auprès de votre public, à l’aide de messages d’information et de prévention, et de supports variés, affiches, flyers, ateliers… A vous de développer ces actions sur vos réseaux et lors de votre événement, et de faire de la communication dessus.
  • Pensez à vos musiciens ! Eux aussi sont particulièrement exposés à ces risques, vos actions à ce sujet peuvent aussi les concerner.

L’association Agison a développé, à destination des organisateurs de festival, le “ouïe kit”. Il contient une liste des bons réflexes à adopter, des supports de prévention physiques et digitaux, des tarifs avantageux pour les protections auditives, des idées et préconisations à propos d’animations autour d’un stand de prévention, des conseils de communications avant et pendant l’événement, et des messages de prévention. Il contient donc tout le nécessaire pour faire de votre manifestation un lieu où chacun peut être conscient des risques et disposer des moyens pour les éviter.

Il existe d’autres initiatives, comme la Journée Nationale de L’audition, qui organise des conférences, expositions, animations culturelles et pédagogiques. N’hésitez pas à vous renseigner sur ce qui existe autour de vous, à une échelle régionale.

Accessibilité

Au sujet de l’audition, il existe également des dispositifs destinés aux personnes sourdes et malentendantes pour que l’expérience musicale et les événements festifs et musicaux leur soient accessibles. Nous vous en parlons dans le sujet dédié.

Pour approfondir

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