Fiche n° 6 : les risques légaux : Le déroulé d’une procédure judiciaire et les systèmes d’aide juridique (3/3)

LE DÉROULÉ D’UNE PROCÉDURE JUDICIAIRE

Vous organisez une soirée et êtes suspecté d’avoir commis une infraction ? Voici le déroulement de la procédure judiciaire.

LA DÉPOSITION

Dans le cadre d’une audition libre

  • L’audition libre n’est pas une garde à vue !

L’audition libre permet aux forces de l’ordre d’entendre une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction sans la placer en garde à vue.

Vous allez tout d’abord recevoir une convocation au commissariat ou à la gendarmerie. Lorsque vous recevez une convocation pour une audition libre veillez à ce qu’elle indique bien :

  • L’infraction dont la personne est soupçonnée. Toute convocation sans une telle mention laisse donc penser qu’il s’agira d’une garde à vue.
  • Votre droit d’être assisté par un avocat au cours de l’audition, uniquement si l’infraction concernée est punie d’une peine de prison. La convocation doit également préciser les modalités de désignation d’un avocat commis d’office. Vous devez faire appel à votre avocat en le contactant avant le jour de la convocation, si vous n’en connaissez pas vous pouvez vous aidez de cette liste : https://consultation.avocat.fr/avocats/par-barreau.php
  • Les conditions d’accès à l’aide juridictionnelle.
  • Les lieux où vous pouvez obtenir des conseils juridiques avant l’audition.

Vous êtes obligés de vous rendre à une convocation dans le cadre d’une audition libre. Si vous n’y allez pas et que la police ou la gendarmerie vient vous chercher, alors vous serez placé en garde à vue.

Avant de débuter l’audition, les forces de l’ordre doivent vous informer de vos droits :

  • Droit de quitter les lieux à tout moment
  • Droit de connaître la qualification, la date et le lieu présumés de l’infraction
  • Droit de garder le silence
  • Droit d’être assisté par un avocat
  • Droit à un interprète si vous ne comprenez pas le français

L’audition libre doit durer maximum quatre heures. Une fois l’audition commencée, vous pouvez donc en théorie partir à tout moment et si les forces de l’ordre refusent, ils devront nécessairement vous placer en garde à vue.

Lors de l’audition, vous allez devoir répondre aux questions des enquêteurs mais faites attention, toutes vos déclarations sont susceptibles d’être retenues contre vous. Gardez à l’esprit que si vous êtes convoqué en audition libre, c’est peut-être parce que les forces de l’ordre ne disposent pas d’éléments suffisants pour vous entendre sous le régime, plus contraignant, de la garde à vue. N’oubliez pas, qu’à tout moment, vous pouvez exercer votre droit au silence, c’est-à-dire ne pas répondre aux questions. Vous pouvez le faire ponctuellement, par exemple :

  • « Je ne me souviens pas de ce point »
  • « Je ne souhaite pas répondre à cette question pour l’instant. Je m’expliquerai si nécessaire devant le juge »

Le tout est de le dire avec calme et de ne pas céder aux éventuelles pressions. Il ne faut pas hésiter à répéter calmement que vous ne souhaitez pas répondre car c’est un droit que vous avez. Vous pouvez aussi exercez totalement ce droit : « Je ne répondrai plus à vos questions à partir de maintenant, je souhaite exercer mon droit au silence ».

Dans le cadre d’une garde à vue (GAV)

La garde à vue est une mesure qui permet à la police ou à la gendarmerie de retenir une personne soupçonnée d’avoir commis un crime ou un délit pour l’interroger et pour pouvoir poursuivre l’enquête en empêchant la modification ou la destruction de preuves, la concertation avec des complices, l’intimidation de victimes ou de témoins ou la fuite du suspect. Elle a une durée maximale de 24H mais peut être prolongée à 48H sur décision écrite du Procureur de la République, une fois que le suspect sera présenté devant lui.

Pour placer une personne en GAV, il faut qu’il existe une ou plusieurs raisons valables de la soupçonner d’avoir commis ou tenter de commettre une infraction punie par une peine de prison.

  • Une personne ne peut donc pas être placée en GAV si elle a commis une infraction punie par une simple amende.

Le suspect placé en GAV doit être immédiatement informé dans une langue qu’il comprend de ses droits :

  • Le droit d’être informé de l’infraction soupçonnée, de son lieu et de sa date
  • Le droit d’être examiné par un médecin
  • Le droit de prévenir un proche, son employeur et le consulat de son pays si la personne est de nationalité étrangère
  • Le droit à un avocat (choisi ou commis d’office) dès le début de la procédure
  • Le droit de se taire
  • Le droit de présenter des observations au Procureur de la République qui se décide sur la prolongation de la GAV
  • Le droit de consulter le procès-verbal du placement en GAV, le certificat médical et le procès-verbal de ses auditions avant la prolongation de la GAV.

Que vous soyez auditionné librement ou placé en garde à vue, ces échanges ont pour but d’écrire une déposition dans laquelle vous allez donner votre version des faits. Soyez donc précis, ne cédez pas à la pression, ne vous accusez pas de choses que vous n’avez pas commises (ne vous accusez pas d’être l’organisateur si vous êtes juste DJ).

Une fois la déposition terminée, vous pourrez la relire. N’hésitez pas à demander à ce qu’elle soit modifiée pour qu’elle corresponde exactement à ce que vous voulez dire. Ce sera l’occasion de corriger vos propos si vous vous êtes un peu laissé aller face à l’officier de police judiciaire.

Restez toujours correct et respectueux avec ceux qui vous interrogent. Si la soirée s’est bien passée, pensez bien à relativiser l’importance de ce dont on vous accuse. Ce n’est qu’une fête après tout…

LES SUITES PÉNALES

Après vos dépositions, les forces de l’ordre transmettent votre dossier au Procureur de la République qui décidera des suites de l’affaire :

  • Procéder au classement de l’affaire sans suite
  • Proposer une composition pénale (ce point est traité dans le paragraphe suivant)
  • Faire un rappel à la loi (ce point sera traité dans le paragraphe qui suivra)
  • Poursuivre devant le tribunal

Cette décision vous sera transmise par courrier. Elle peut parfois être très longue (6mois/1an).

La composition pénale

La composition pénale est une procédure qui permet au Procureur de la République de proposer à une personne ayant commis une infraction des mesures autres que des poursuites judiciaires. Elle évite donc un procès pénal.

Pour qu’elle soit acceptée, il faut que la personne reconnaisse les faits et accepte qu’il y ait une composition pénale. Les mesures prises par le Procureur de la République vont de l’amende (dont le montant ne peut pas être supérieur à celui de l’amende encourue pour l’infraction ou le délit) au stage civique en passant par le travail d’intérêt général ou la confiscation de la chose ayant servi à commettre l’infraction.

Si on vous propose une mesure de composition pénale, vous recevrez une convocation à une audience au Tribunal de Grande Instance devant un délégué du Procureur de la République.

Votre présence est obligatoire sinon la proposition sera considérée comme refusée. Vous n’avez pas besoin d’un avocat puisque ce n’est pas un jugement et vous ne pourrez pas faire valoir vos arguments.

Vous n’avez que 3 possibilités (vous devrez simplement cocher une case sur le document) :

  • Accepter la mesure immédiatement. (A faire si l’amende est vraiment minime)
  • Demander un délai de réflexion de 10 jours avant de répondre. Ce délai vous permet alors d’évaluer les risques, de prendre des conseils (c’est le moment de contacter un avocat ou le service juridique de Freeform pour avoir un conseil) et de vous renseigner sur le niveau des sanctions infligées par votre juridiction qui varient sensiblement en fonction de votre situation géographique. Attention car l’absence de réponse à la proposition dans ce délai de 10 jours, équivaut à un refus.
  • Refuser la mesure, auquel cas vous passerez en jugement.

La composition pénale n’est PAS ADAPTÉE à l’amende pour défaut de déclaration de rassemblement festif ou au délit d’agression sonore par exemple. Ainsi, si vous avez organisé une soirée de 100 personnes et qu’on vous propose de passer en composition pénale, REFUSEZ la, il n’y a aucune raison qu’elle soit justifiée.

Dans le cas des organisateurs de soirée de plus de 500 personnes, vous devez la refuser sauf si elle est réellement intéressante (cas d’une amende faible ou de la restitution du matériel saisi).

Le rappel à la loi

Le rappel à la loi est une procédure qui permet au Procureur de la République de proposer à une personne ayant commis une infraction de faible gravité une mesure autre que des poursuites judiciaires. Le Procureur de la République convoque la personne qui a commis l’infraction et lui rappelle ses obligations pour lui faire prendre conscience qu’elle a commis un acte illégal afin d’éviter la récidive.

Le rappel à la loi n’est pas une condamnation, il n’est donc pas mentionné au casier judiciaire mais en cas de récidive, le Procureur de la République peut engager des poursuites judiciaires et la personne pourra donc être condamnée à des peines plus importantes.

L’audience au tribunal

Vous allez recevoir une convocation au tribunal par courrier qui vous indiquera la date, le lieu et l’heure de votre convocation. Votre présence est obligatoire. Si vous ne pouvez vraiment pas vous y rendre (cas de force majeure) :

  • Vous pourrez vous faire représenter par votre avocat si vous en avez un.
  • Vous pouvez également écrire une lettre au président du tribunal en fournissant le justificatif de votre absence et en demandant un report d’audience ou en demandant à ce que le procès ait lieu sans vous.

Le jour du procès, c’est le juge qui mènera le débat et qui vous interrogera. Puis le Procureur de la République citera la loi et réclamera une certaine peine. Vous ou votre avocat (si vous en avez un) présenterez ensuite votre défense. Le juge délibérera ensuite et la décision sera rendue soit immédiatement soit à une autre date qui vous sera communiquée.

S’il y a beaucoup de matériel en jeu, nous vous conseillons de prendre un avocat.

  • Il faut compter environ 1000€ pour les frais d’avocat. Vous pouvez demander à bénéficier de l’aide juridictionnelle si vous remplissez les conditions requises (ce point est traité dans le dernier paragraphe).

L’appel de la décision

Si vous n’êtes pas satisfait de la décision rendue, vous pouvez faire appel dans un délai de 10 jours après le jugement auprès du greffe du tribunal pour que l’affaire soit rejugée. L’appel est suspensif (sauf devant la Cour de Cassation) donc la décision qu’a rendu ce tribunal ne pourra pas être exécutée tant que la Cour d’appel n’aura pas rendu la sienne.

Attention, les délais sont extrêmement longs et la décision de la Cour d’appel pourra potentiellement être la même que le jugement du premier tribunal.

Le Procureur de la République a lui aussi la possibilité de faire appel du jugement s’il ne lui convient pas.

Si vous n’êtes pas jugé dans un délai de 6 mois ou si vous êtes relaxé, vous pouvez demander la restitution de votre matériel saisi, soit en remplissant le formulaire Cerfa n° 13488*01 « Demande de restitution d’un objet placé sous main de justice » et en l’envoyant au greffe du tribunal par courrier soit en remplissant le formulaire en ligne que vous trouverez ici :

https://mdel.mon.service-public.fr/mademarchev5/sfjsp?interviewID=13488.

Si votre demande est acceptée, la décision de restitution du matériel saisi ainsi qu’un avis ou une convocation vous invitant à venir le récupérer dans un délai de 2 mois vous sera envoyé.

L’ASSISTANCE JURIDIQUE GRATUITE et L’AIDE JURIDICTIONNELLE

L’ASSISTANCE JURIDIQUE GRATUITE

Vous pouvez consulter gratuitement un avocat lors des permanences proposées par différents organismes et institutions (les Maisons de la Justice et du Droit : http://www.annuaires.justice.gouv.fr/annuaires-12162/annuaire-des-maisons-de-justice-et-du-droit-21773.html, les Centres Départementaux d’Accès au Droit (CDAD), certaines mairies et certains tribunaux d’instance et de Grande Instance, …).

Vous pouvez aussi vérifier si vous bénéficiez, d’une protection juridique :

  • Au titre de votre contrat d’assurance habitation
  • Au titre de l’assurance dont vous disposez avec votre carte bancaire

Si c’est le cas, appelez-les, expliquez-leur votre situation en leur demandant s’ils acceptent d’intervenir et s’ils acceptent, jusqu’à quel plafond (en euros). Dans le cas où ils accepteraient, ils vont possiblement vouloir imposer leur avocat. Vous pouvez refuser afin de choisir un avocat spécialisé concernant ce qui vous est reproché. Il faudra juste vous assurez que l’avocat que vous choisirez travaillera pour des honoraires en-dessous du plafond que prend en charge votre assurance.

Dans le cas où ils refuseraient vous pouvez :

  • Insister et demander le motif précis de refus
  • Leur demander de vous envoyer par mail les causes d’exclusions de votre contrat, afin que vous puissiez vérifier ce qu’ils avancent
  • Si vous avez un doute, envoyer leur un mail ou un courrier en expliquant pourquoi leur refus de prise en charge ne vous paraît pas justifié et demandez qu’ils vous répondent par écrit.

L’AIDE JURIDICTIONNELLE

L’aide juridictionnelle est la prise en charge par l’Etat, en totalité ou en partie, des frais de justice de personnes à faibles revenus.

Elle peut vous être accordée :

  • Si vous êtes en procès, pour une transaction, pour faire exécuter une décision de justice, si vous êtes mineur et auditionné par un juge, pour une reconnaissance préalable de culpabilité, …).
  • En fonction de vos revenus et des personnes à votre charge :
  • Pour bénéficier de l’aide juridictionnelle totale en 2016, la moyenne mensuelle des revenus perçus par foyer doit être inférieure ou égale à 1000€.
  • Pour bénéficier de l’aide juridictionnelle de l’Etat comprise entre 15% et 85% en 2016, la moyenne mensuelle des revenus perçus par foyer doit être comprise entre 1000€ et 1500€.

Vous pouvez vérifier approximativement si vous pouvez en bénéficier en consultant les plafonds à la page suivante : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F18074

Vous pouvez demander l’aide avant ou pendant l’affaire en remplissant le formulaire Cerfa 12467*02 que vous pouvez trouver sur : https://www.formulaires.modernisation.gouv.fr/gf/cerfa_15626.do  ou en le demandant à la mairie ou au tribunal.

Le formulaire est assez simple et vous pouvez le remplir directement depuis votre ordinateur puis l’imprimer. Il faut cependant être attentif à quelques points sur le formulaire (n’hésitez pas à nous contacter si vous des hésitations) :

« 3 – Votre demande »

Vous pouvez choisir l’avocat que vous souhaitez en indiquant son nom dans : « 3 – Votre demande à  C – l’auxiliaire de justice à  2 – ‘vous avez déjà choisi’ ». Cependant, pensez d’abord à vous assurer qu’il accepte de travailler à l’aide juridictionnelle.

« 4 – Votre situation financière et patrimoniale »

Si vous êtes bénéficiaire du RSA, l’aide juridictionnelle totale vous est automatiquement accordée. Ainsi si vous l’êtes, vous pouvez rajouter à la main « Bénéficiaire du RSA = Aide Juridictionnelle de plein droit » à côté de la première case que vous aurez coché.

Lorsque vous remplissez le tableau des ressources, pensez bien à diviser vos ressources annuelles par douze car on vous demande une moyenne mensuelle. Si vos revenus ont baissé depuis votre dernière déclaration d’impôts, indiquez votre moyenne mensuelle actuelle.

Vous devez déclarer vos salaires, allocations Pôle emploi et pensions alimentaires mais vous n’avez pas à déclarer les prestations familiales, l’APL, la prime d’activité.

Pensez bien à joindre l’ensemble des documents nécessaires à votre demande. Vous n’êtes pas obligé de joindre l’attestation de non-prise en charge par l’assureur :  Vous pouvez simplement rédigez vous-même un document manuscrit de type : « Je soussigné, M. (nom prénom), né le (date de naissance) à (commune de naissance), certifie : ne pas avoir de contrat de protection juridique OU que mon contrat de protection juridique ne couvre pas ce litige ».

Enfin, envoyer la demande au Tribunal de grande instance (TGI) de votre domicile ou du tribunal en charge de votre affaire. Généralement il s’agit du même TGI mais assurez-vous en grâce à l’annuaire suivant (taper les deux adresses) : http://www.annuaires.justice.gouv.fr/annuaires-12162/annuaire-des-tribunaux-de-grande-instance-21768.html

L’AVOCAT COMMIS D’OFFICE

Si vous ne connaissez pas d’avocat ou que vous êtes placé en garde à vue et que vous n’avez pas le temps d’en engager un, un avocat commis d’office sera désigné pour vous défendre. L’avocat commis d’office a les mêmes attributions : il doit vous assister, vous représenter et vous défendre.

Les services de l’avocat commis d’office ne sont pas gratuits, sauf si vous bénéficiez de l’aide juridictionnelle.

RÉCAPITULATIF DES INFRACTIONS

 ContraventionDélitJugementAppel possibleAppel déconseillé
Tapage nocturnex   x
Travail dissimulé xxx 
Abandon de déchetsx   x
Effraction/dégradation xxx 
Mise en danger de la vie d’autrui xxx 
Facilitation trafic stups xxx 
Agression sonore xxx 
Non déclaration de soirée de plus de 500x xx 

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